Les ruines circulaires
Je parle à tort dans mon histoire de "L'homme qui dort" de Borgès. Le titre est "Les ruines circulaires", nouvelle parue dans le recueil "Fictions". L'histoire raconte un homme qui surgit dans un temple abandonné dans la jungle et entreprend une tâche surnaturelle: rêver un être humain, devenir une sorte de docteur Frankenstein onirique. Comme souvent avec Borges, cela ouvre une réflexion mise en abîme: qui suis-je si je suis une créature pensée par un autre; et moi-même, le créateur, ne suis-je pas aussi le produit d'un rêve? Question d'ordre quasiment spirituel car, si nous sommes croyants, nous pouvons nous dire le rêve de Dieu. Qui ou que suis-je... Quelle est ma véritable part de liberté et mon libre arbitre existe-t-il?... Il y a, puisque la chose semble indécidable, une irréfragable part de liberté qui nous reste: croire ou ne pas croire en notre libre arbitre ou, au contraire, en notre prédestination.
De sorte qu'aucun rêve ne nous délivre de l'angoisse de liberté puisque la liberté, aussi paradoxal que cela puisse paraître, est source d'angoisse. C'est d'ailleurs ce qu'on a pu vérifier dans certains processus "d'entreprise libérée". Où l'organisation rêvée tourne parfois au cauchemar: voir mon article "Liberté, je crains ton nom"