Réussir, c’est-à-dire être satisfait de ses accomplissements, c’est avoir trouvé l’ajustement avec le monde.
Le monde tel qu’il est.
Or le monde bouge, sans cesse. Les choses s’améliorent, des choses se détériorent. Le monde devient autre.
Avec
l’âge se multiplient les occasions de voir défaits nos
accomplissements et d’avoir à revenir sur ce que nous croyions
acquis,
Ce qui fonctionnait hier ne fonctionne plus aujourd'hui.
Nous
oublions que, hier, nous étions jeunes — et peut-être un peu
inexpérimentés — et avons su composer avec le monde tel qu'il était à
l'époque. La nouveauté du monde d'aujourd'hui nous replonge dans
l'incertitude des débuts. À quoi s'ajoute, pour nous qui ne sommes plus
tout à fait des perdreaux de l'année, un certain sentiment de
déclassement : J'avais réussi et gagné ma place sur le grand podium du
monde. Me voici à nouveau au bas de l'échelle.
Plutôt
que d'accepter ce sentiment insupportable, nous préférons invoquer la
décadence, l'inconséquence de la jeunesse qui n'est pas à la hauteur de
ce que nous étions, et le délitement de la société.
Sur
le grand théâtre du monde, les décors et les personnages changent sans
cesse, la pièce que nous avions apprise ne se joue plus. Une autre a
pris la suite et nous y avons notre place si seulement nous renonçons à
nos acquis.